Ecriture d'invention en français.
[ .Akame. ]
Ce fut comme une apparition.
Sous ses yeux sombres de promeneur égaré, cette personne sembla sortir de nulle part, il était seul; car quand ses yeux ses posèrent sur l'inconnu, le monde autour, tout à coup, semblait ne plus exister. L'apparition s'assit dans l'herbe humide de ce matin d'hiver, tandis que le jeune homme aux yeux sombres passait derrière lui, détournant la tête par réflexe. Il entreprit de s'asseoir sur le banc un peu plus loin, puis le contempla.
Ses cheveux noirs de jais tombaient effrontément devant ses yeux noisettes, et laissaient entrevoir une nuque dégagée d'une blancheur éclatante, presque irréelle, qui se confondait avec son épais manteau couleur crème. De loin, on aurait dit que la neige l'avait jugé seul digne de revêtir son manteau, au point de ne tomber que sur lui et atour. Il griffonnait quelque croquis; il sortit de sa poche une écharpe grise dans laquelle il s'enveloppa, masquant la partie inférieure de son visage. Mais ses yeux, puits sans fond magnifiques, étaient rehaussés de sourcils admirablement dessinés et se détachaient du paysage tout entier.
Comme il ne semblait pas détourner son attention de son bloc à dessin, Jin s'avança prudemment, et après nombres de détours qui se voulaient tant bien que mal naturels, il s'assit contre le tronc noueux d'un saule, à quelque distance seulement de l'objet de son attention. Il sortit un livre, par prétexte, et continua d'observer par dessus les pages imprimées son Ange Hivernal, sans s'apercevoir qu'il tenait son livre à l'envers.
Jamais un être humain ne lui avait paru aussi beau et surréaliste à la fois; ses yeux perçants et pourtant si doux, la courbe de sa nuque que l'on devinait si fragile sous sa longue écharpe, et enfin ses doigts blancs, si fins et délicats, admirablement tâchés de fusain qui l'étalaient avec insolence sur la feuille encore vierge quelques minutes avant. D'où il venait, ce qu'il aimait, le nom qu'il portait... A ce moment là, ses yeux brillants trahissaient l'envie ardente de tout connaître de lui; le son de sa voix, l'éclat de ses yeux quand ils étaient remplis de colère, de joie, de désir...? La musique qu'il écoutait, la manière dont il portait la nourriture à sa bouche, il aurait souhaité en cet instant que tout cela ne lui appartienne qu'à lui seul, même si cela n'égalait pas ce qu'il désirait au fond de lui-même, ce qui était enfoui sous une multitude d'envies annexes.
Une mélodie les tira tous les deux, l'un de sa contemplation, l'autre de son ouvrage. La surprise avait fait glisser son écharpe, dégageant des lèvres fines et rosées, rehaussées par l'éclat de ses pommettes rougies par le froid. L'ange blanc porta un cellulaire à son oreille. ..."...Oui?... Non, je suis sorti... Au même endroit que d'habitude, tu devrais le savoir depuis le temps...". Sa bouche et ses yeux s'étirèrent en un fin et délicat sourire, si chaleureux. "Oui d'accord, à tout à l'heure...".
Jin, sans bien savoir pourquoi, était heureux. alors, sa voix était douce et posée, aux intonations si élégantes. Chantait-il? Et il se plût à imaginer sa voix si suave s'élever dans l'air froid et vierge de tout chant d'oiseau.
Cependant, tandis qu'il rangeait son cellulaire, une brise soudaine fit virevolter la feuille sur laquelle il travaillait avec tant d'attention. Jin, laissant son livre s'écraser dans l'herbe humide, saisit la feuille en tâchant de ne pas la froisser. Le cœur battant, il se dirigea vers le bel inconnu, son souffle laissant échapper un peu de buée dans l'air de Janvier. Il la lui tendit.
- Merci, c'est gentil, dit-il avec un sourire.
Leurs yeux se rencontrèrent.