Chapitre 2
Dési...rable ?
Une bulle qui éclate, un rêve qui se brise, des paupières qui s'ouvrent avec violence, les pupilles agressées par la lumière des vestiaires sur le carrelage trop blanc.
" Jin, JIN ! "
Et lui, collé contre son torse, une lueur d'incompréhension mêlée à de l'inquiétude dans le regard. Jin détourna les yeux. Le countdown, la fin du spectacle, les vestiaires. Il fixa le carrelage avec grand intérêt avant d'ôter ses mains de ces épaules larges et rassurantes.
...
Minute ! Quelles épaules ?
" GYAAAAAAAAAAAAH."
Son malheureux comparse effectua un vol plané pour s'écraser au sol deux mètres plus loin. Jin le fixait avec frayeur, chaque parcelle de peau auparavant en contact avec la sienne semblant le brûler vivement. Les lèvres tremblantes, il n'osait même plus croiser son regard, trop peureux d'avoir été découvert, d'avoir eu ses sentiments révélés et ses pulsions mises à nues. Il déglutit et fit semblant de regarder Tomohisa dans les yeux, posant en fait son regard contre une fissure visible par dessus son épaule. Oh, la jolie fissure... ~
" Je,... je.. Qu'est-ce qui s'est passé ? " placa-t-il maladroitement.
Dans un grognement, Pi se releva, se massant la clavicule, et s'assit sur un banc, de côté par rapport à Jin. Il lui adressa un regard plein de reproches. Le visage d'Akanishi se décomposa, ces yeux semblaient découper son coeur au cutter, cette main qui massait cette épaule douloureuse semblant prêt à tout pour écraser ses misérables sentiments en son poing... Finalement, tandis que Bakanishi posait sa main devant ses yeux, encore trop fraîchement plongés dans cette réalité qu'ils refusaient, Pi lança simplement, un brin amusé, avec une nuance d'exaspération dans la voix :
" Eh ben, ça se voit que ça fait longtemps que tu ne l'as pas vue, ta copine " fit-il en riant doucement.
Il se leva et se dirigea vers Jin, qui ne le voyait pas, trop plongé dans ses pensées. Il pense que j'ai encore un copine, ouin. Tu le sais, Tomo, tu le sais ça, que je fais voeu d'abstinence pour toi ? Mais non il ne le sait pas, imbécile.
" Allez, viens te reposer à la maison, t'en as bien besoin."
C'est pourquoi il sursauta quand il sentit la main de son ami tapoter son épaule.
" UWAAAA."
Tomo sursauta à nouveau. Décidément, quelle mouche le piquait ce soir ? Il chassa ses préoccupations d'un secouage de tête, se disant que Jin devait être extrêmement fatigué. Il saisit son sac et celui de son camarade, tirant ce dernier par le bras.
" Allez Jin, viens, fait pas ton gosse. "
Il se laissa traîner, tout penaud. Il était crevé, avait transpiré et dansé toute cette dernière semaine, sans parler du chant et des performances. La fatigue, ses muscles engourdis, son esprit embrumé encore des molécules d'adrénaline... Tout cela ajouté à la chaleur moite s'échappant des douches dans les vestiaires surchauffés par tous ces corps en ébullition... Il s'était simplement laissé aller, il s'était endormi, et dans son sommeil s'était maladroitement laissé prendre par ses pulsions. Tandis qu'il songeait à tout cela le regard vitreux, les couloirs defilaient à leurs côtés, tandis que Pi le traînait en dehors de la salle en direction du parking, le tenant toujours par le poignet. Sa main sur sa peau...
Maintenant qu'il s'en rendit compte, tout son esprit resta bloqué dessus jusqu'à ce qu'ils arrivent à la voiture de son aimé inavoué, qui lui avait l'impression de se coltiner un 'FrankenJin' qui n'était pas dans son état habituel. Pour l'instant il l'avait laissé tranquille mais qu'importe, il le cuisinerait une fois sur la route. Et si jamais il n'y parvenait pas, il aurait encore du temps une fois rendus chez lui. Abandonnant Jin devant la portière passager, il s'engouffra côté conducteur, son téléphone à l'oreille.
" Hm, oui ? Allo ? Oui Maman, on arrive. J'amène Jin, il y aura assez à manger je suppose ? D'accord, à tout de suite. Et, au fait... Bonne année Maman ! "
Et il raccrocha, enclanchant le contact. Il se pencha, ouvrant la portière opposée à la sienne, face à face avec Jin le Zombie.
" Oh, Jin, tu montes ? "
Bien sûr, qu'il allait le monter ! EUH... Monter dans la voiture... Seulement monter dans la voiture. Mais, minute, dans la voiture, il y a une banquette, ne ? Et sur la banqueeeeeette...?
Il s'assit sur son siège en esquissant un large sourire stupide, qui s'éanouit aussitôt, alors qu'il s'écrasa la front sur le tableau de bord.
Oui, mais non, Bakanishi, tu songes qu'à faire des cochonneries avec lui alors qu'il n'est même pas au courant. C'est ainsi que, les yeux larmoyants et la voix tremblante de faux sanglots, il demanda à son ami :
" Bah oui, parce qu'après tout pour vous, je suis et ne resterais qu'un Bakanishi, hein ? Hein ? "
Pi lui assèna une tape sur le haut du crâne.
" Tais-toi Jin, tu commences à raconter des conneries. Et mets ta ceinture. "
La joue écrasée contre la vitre, Jin sourit à nouveau niaisement. Il adorait se faire engueuler par Tomo, il avait toute son attention. Même le coup qu'il lui avait porté à la tête semblait être seulement une douce caresse... Seulement, il ne comptait pas le laisser baigner dans cette douce béatitude.
" Jin, tu veux bien me dire ce qui t'arrives ? "
" Mh? " interrogea-t-il, la bouche en cul de poule.
" Je t'explique. Pendant le countdown, sur Seihun amigo avec Ryo et Kamenashi, tu t'es gourré au moins trois fois, sur je ne sais plus quel morceau tu as inversé les paroles et enfin quand il fallait aller saluer le public tu étais ailleurs."
Jin arbora une mine plus sombre. S'il en savait la raison...
" ...Tellement ailleurs que j'ai du venir te chercher par la main. Et d'ailleurs tu me l'a serrée tellement fort j'ai cru que tu allais me la broyer. J'ai souri devant les fans, question de professionalisme, mais maintenant je me pose des questions."
Les lumières nocturnes émanant de la fourmillière qu'était Tokyo apposait ses tâches blafardes sur le visage de Tomohisa, parfois traversé par l'ombre d'un poteau ou d'un building, et en magnifiait tous les traits. Ces yeux sombres et pénétrants, qui se voulaient sûrs d'eux mais cachant les faiblesses que Jin connaissait sur le bout des doigts, cette bouche charnue et pleine qui ne faisait que l'appeler, que son propriétaire maltraitait et tordait dans tous les sens lorsqu'il était ému ou gêné. A cet instant, son amour était magnifique, c'est tout. Absorbé dans sa contemplation, Jin n'écouta pas le laïus de son collègue sinon la dernière phrase, qu'il déchiffra après plusieurs secondes de réflexion, histoire de recoller les morceaux brumeux de ses paroles, et répondit, se voulant dégagé et l'air de rien :
" Et tu voudrais des réponses ? "
" A ton avis, idiot ? "
Merde, il se retrouvait à présent comme con. Une réponse plausible, vite une réponse.
" Peut-être,... n'as-tu pas cherché... encore assez longtemps ? "
" Avoue tout de suite que tu m'écoutes pas, tes conversations faîtes avec des bouts de scotch, je les connais."
Merde, grillé. Il soupira, lui aussi quelque peu énervé, et décida de bouder, le menton dans sa main, se tournant vers la vitre.
" Soit, je ne t'écoutais pas, alors si tu t'en rends compte, arrête de me parler. "
Le reste du trajet se déroula en silence. une fois arrivés, en claquant la porte, Jin maugréa dans sa barbichette.
" I wish you a Merry Christmas and.. a happy New Year... Mon cul ! "
Tomo leva à son encontre un souricl dubitatif.
"Tu disais ?"
"Non, rien."
Non rien, il ne lui dirait rien, pas ce soir. Il l'invita d'un signe de tête à se diriger vers le perron de sa grande maison. Il soupira, puis le suivit, et remit son masque de bonne humeur sur son visage. Il sourit à la mère de Tomo, qui l'embrassa chaleureusement comme son propre fils, salua sa soeur cadette, Rina, et s'inclina devant son père. Son esprit s'embruma quelque peu quelques heures durant encore, illusionné par cette ambiance familiale qu'il avait toujours tant aimé, et cela, même le malaise quelque peu palpable entre lui et Tomohisa ne pourrait le lui enlever.
Ils mangèrent joyeusement leur repas de réveillon tardif, et après deux heures de conversations enjouées et quelques baillements, Tomo se leva de table.
" Je suis désolé, mais je n'en peux plus. Je crois que je vais aller me coucher."
Jin se leva à son tour, histoire de ne pas paraître étrange en ne voulant pas suivre son ami.
" Bon, et bien... moi aussi. Je dors dans ta chambre, Tomo ? "
" Comme d'habitude " lui répondit-il avec ce sourire chaleureux qu'il semblait avoir retrouvé et que Jin lui renvoya. Ils montèrent les escaliers, souhaitant bonne nuit au reste de la famille, Rina s'étant déjà assoupie sur le canapé.
Une fois les aprents hors de vue, le visage de Jin retrouva sa forme inquiète et soucieuse. Comment allait se passer cette nuit avec lui, après cet incident aux vestiaires ?